Mangú en 677 mots…
Roberto Mangú Quesada (né en 1948) connu aussi sous les noms de Roberto Mangou et Roberto Mangú est un peintre, dessinateur, sculpteur franco espagnol dont la carrière s’est essentiellement développée en Italie. Profondément influencé par Bonnard et Chagall, ses ateliers successifs de Paris, Milan, Séville, Madrid, Bruxelles, Gênes … sont autant d’étapes où, partant de « la nécessité de reprendre la question de l’être » chère à Martin Heidegger, il développera peu à peu une œuvre centrée sur l’aventure de l’homme basée sur le temps long et sur les invariances du monde qu’il nomme Permanenza. La Permanenza qui selon lui « n’est autre qu’un second âge de la modernité bâtie sur les épiphanies des invariances du monde, un second âge qui proclame que le monde sera sauvé par la beauté, un second âge de la modernité qui proclame la nécessité de relier l’homme à la nature et au vivant » ; Et c’est Georges Fall qui fut son marchand qui, à la fin des années 90, synthétisera sa démarche picturale : « finalement, je comprends, vous renouez avec l’aventure de l’homme ». Dès son origine sa peinture s’est développée dans la spiritualité de ces deux axes convergents : le retour et la présence de l’être dans les invariances du monde où comme il le dit, « tout change mais rien ne change ». Par la dimension intemporelle de sa vision, sa peinture se présente libérée de tous les standards de l’art dit contemporain et se définit comme une peinture oraculaire, annonciatrice basée sur l’idée de nature globale, de continuum, inspirée de Diderot. Selon lui, face à la nécessité de changement de paradigme – générée par les indicateurs de l’épuisement en cours de la modernité – sa peinture propose l’exact opposé du cubisme. Il dit : « Cette voie de la nature globale que Bonnard a portée, s’oppose radicalement à toute la peinture des débuts du XXème siècle qui portait l’annonce du triomphe de la modernité. Il revient au splendide cubisme non seulement d’avoir annoncé la modernité, mais surtout de lui avoir donné sa forme : la fragmentation ; qui est l’exacte opposé du continuum ». À la formule de Bonnard « l’œuvre d’art, un arrêt du temps » Mangú précise « l’œuvre d’art, un réel en devenir ».
Mangú renoue avec la dimension magique de l’art qui permet de communier avec les forces de la nature. Son œuvre la plus emblématique s’incarne sous la forme d’un être zoomorphe, anthropomorphe, minéral, végétal et magnétique qu’il a baptisé Mintak,émanation formelle de la force vitale qui semble puiser aux sources de la vie.
Mangú n’a pas peint consciemment le premier Mintak. Sa peinture l’a précédé. C’est en observant son San Francesco, achevé en 1992 et qui l’intriguait que, des années plus tard, il a pris conscience d’une présence luttant dans le corps du Saint. Mintak s’était lui-même invité dans la peinture de Mangú. L’apparition de Mintak, entre figure mythique et esprit magique, depuis lors, habite ses toiles comme un témoignage qu’elles sont à la source de toutes choses du monde matérialisant la présence simultanée, de l’esprit de l’Homme dans les invariances du Réel et du Temps.
Au-delà de l’esthétique et du nouveau pour le nouveau sa peinture est une œuvre réglée sur le Vivant qui selon lui est capable de faire contrepoids, par la beauté qui seule guérit, et qui seule est capable de se connecter à la force vitale pour transmettre et élever la conscience et participer ainsi au grand retournement annoncé par Annick de Souzenelle.
Les sujets de ses tableaux sont tous puisés dans les invariances de l’aventure de l’homme, leur gestuelle, qu’elle soit dynamique ou fixe, se réfère toujours à une danse des origines qui renvoie à l’union de l’homme et de la nature. Par cette rencontre, sa peinture réalise le dialogue nécessaire de la modernité avec sa propre histoire ; celle de l’aventure de l’homme et d’une nature retrouvée dans le monde du XXIème siècle. La peinture de Mangú c’est l’énigme de la présence de l’Intemporel dans la modernité ; c’est la peinture d’un nouveau règne.
Thèmes
Des thèmes récurrents traversent l’œuvre de Roberto Mangú. Alain Santacreu dans Le Cœur émeraude de Roberto Mangú7 y voit l’expression d’une tradition picturale ancestrale, primordiale, enracinée dans la religiosité des origines. »
Dans les années 1980-90 il s’agit d’hommes debout, monolithes, saints, qui convergent tous à la fin des années 1990 dans deux polyptiques de grandes dimensions, Corpus Mundi et Saint-Georges
À partir des années 2000, selon Gwen Garnier-Duguy dans Le Sens de l’Épopée, trois thèmes centraux parcourent la peinture de Roberto Mangú : Mintak, qualifié d’Aleph par Alain Santacreu, Permanenza et La Refloraison du Monde. Trois thèmes qui se conjuguent et expriment les rapports de l’homme et de la Nature confrontés à la modernité. Des rapports où l’énergie vitale porteuse de l’essentiel est constamment en jeu. Mangú peint des espaces indéfinis où l’homme est toujours suggéré immobile ou par des formes qui s’apparentent à une danse des origines en communion avec la Nature. À partir de 2013 ses œuvres soulignent le caractère sacré de la danse. Symbole de vitalité et de créativité.
Aspects formels
Peinture de grand format, en dehors de toute référence conceptuelle et néo-expressioniste, l’œuvre de Mangú, très influencé par le hiératisme et le mysticisme de Zurbarán, s’inspire essentiellement du romantisme de Odilon Redon, du symbolisme de Chagall et du panthéisme de Bonnard. La vitalité présente dans ses premières peintures (celles du début des années 1980, notamment « Virée sur la côte » ou « Toro mécanique »), sa maîtrise des couleurs vives, notamment un rouge et un bleu intense (Aldébaran, Lola) ont incité la critique pendant un temps à l’assimiler par erreur au néo-expressionnisme, aux nouveaux fauves ou à la Trans-avant-garde. Comme le remarque Alessandra Troncana dans le Corriere della Serra « le travail de Mangú est trop original et personnel pour pouvoir être classé si facilement». Il s’est ainsi graduellement détaché des couleurs vives, pour employer des tons plus sombres et a travaillé des techniques très différentes, notamment la peinture « en négatif » où les formes sont dessinées par le retranchement de la couleur (grâce à de grandes plages blanches) qui constitue le fond de la toile (la série Pan y Vino). Plus tard, Mangú est retourné à la couleur, notamment à travers un orange intense dans sa période Permanenza, avant de revenir à des bleus plus calmes dans sa période Mar Adentro.
Esprit de l’œuvre selon Philippe Daverio
Qui écrit quant à lui : « tu per me rappresenti una Spagna pittorica che non ha nulla a che vedere con i libri di storia dell’arte e ancor meno con i musei di Madrid. Ciò che mi ha colpito, la prima volta che ho visto i tuoi quadri, è lo spirito feroce, ribelle e indomabile che li animava. Ciò che mi ha convinto della loro autenticità, era quanto essi corrispondessero al tuo aspetto medesimo. Tu non hai ricominciato a dipingere. Tu hai sempre dipinto. E persisti nel dipingere a modo tuo, con tanto vigore. La tua visione fisica e corporale, la tua visione metafisica, è come le tue radici lontane nelle vie dei sobborghi di Parigi, quelle dei gitani »